Pourquoi ce sujet de thèse ?
Nicolas Di Camillo :
Ce sujet de thèse est né d’un constat : les études juridiques consacrées à la protection sociale complémentaire ne proposaient pas d’analyse d’ensemble, systémique, concernant à la fois tous les risques sociaux et tous les bénéficiaires. Or, il apparaissait que la protection sociale complémentaire était dotée d’une dynamique propre, et que cette dynamique était de nature à éclairer ce qu’est devenue la protection sociale.
Pour mener à bien une telle entreprise, il fallait cependant trouver un axe, un prisme : ce furent les mobilités professionnelles. En étudiant les conséquences qu’engendre le passage d’un statut professionnel à un autre sur les garanties, il était en effet possible de décrire comment la protection sociale complémentaire a été construite juridiquement. En d’autres mots, les mobilités professionnelles ont servi à mettre le droit à l’épreuve, à éclairer ses constructions.
Isabelle Vacarie
: Chacun perçoit, en effet, l’expansion de la protection sociale complémentaire comme les difficultés que même les meilleurs spécialistes rencontrent, pour l’embrasser. Nicolas Di Camillo n’a pas craint de relever le défi en se livrant à un travail de systématisation destiné à mettre en exergue le sens et la portée d’un corpus juridique dispersé dans plusieurs codes, mêlant des techniques empruntées à l’assurance et à l’épargne mais aussi à l’aide sociale, et mettant en concurrence des formes d’institutions aussi contrastées que mutuelles, institutions paritaires de prévoyance, sociétés d’assurances ou établissements financiers.
Au prisme des mobilités professionnelles : l’emploi du pluriel de préférence au singulier n’est pas anodin. Il manifeste son projet de saisir, dans toute leur diversité, les situations que la personne est susceptible de connaître au cours de la vie.
Quel est, selon vous, l'apport de la thèse au droit ?
N.D.C. :
Bien connue au travers des complémentaires santé, de la retraite complémentaire ou de l’épargne retraite, la protection sociale complémentaire regroupe aujourd’hui des garanties d’horizons divers.
Cette thèse permet de montrer que s’opère un basculement d’une protection sociale complémentaire construite par catégorie professionnelle vers une protection sociale complémentaire attachée à la personne. Les conséquences d’une mobilité professionnelle en sortent transformées, puisque ces garanties nouvelles peuvent désormais suivre le bénéficiaire dans ses choix de carrière. C’est tout du moins ce qu’une première impression laisse à penser, bien vite tempérée par l’analyse des normes juridiques.
Plus fondamentalement, ce travail a été l’occasion de proposer une définition de la protection sociale complémentaire, puis d’envisager comment ses transformations viennent altérer les frontières traditionnellement admises de la protection sociale ; frontières avec la sécurité sociale bien sûr, mais également avec les assurances ou l’épargne.