QUEL AVENIR POUR L'ETAT PROVIDENCE APRÈS
LA CRISE DU CORONAVIRUS ?
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Jesus Cruz VILLALON
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Professeur de droit du travail et de la sécurité sociale à l'Université de Séville (Espagne),
Président du Comité consultatif national sur les conventions collectives
La paralysie économique, due à la déclaration de l'état d'alerte et au confinement de la population pour empêcher la propagation du COVID-19, a entraîné la fermeture générale de tous les types de centres de travail. Cela a entraîné une lourde perte d'emploi et, avec elle, du revenu de subsistance de nombreux travailleurs. La fermeture d'entreprises a été en partie contrecarrée par le développement du télétravail, mais celui-ci a été clairement insuffisant et n'a pas été généralisé dans tous les secteurs productifs.
Parallèlement, avant même la pandémie, la présence d'un groupe de population important et économiquement très vulnérable a été détectée, avec des risques de marginalité et d'exclusion sociale importants. Les taux d'extrême pauvreté en Espagne sont supérieurs à la moyenne européenne et sont particulièrement profonds en ce qui concerne les chômeurs peu qualifiés, les chômeurs de longue durée, les poches importantes de travailleurs pauvres en raison de l'exercice d'emplois mal rémunérés, temporaires et à temps partiel, et la présence très inquiétante de la pauvreté infantile.
Dans ce scénario, des mesures de réaction immédiate ont été prises, dès que la détérioration de la situation économique et de l'emploi a été détectée. Les mesures sociales adoptées ont été au cœur de l'intervention publique globale pour lutter contre la pandémie, agissant à la fois dans le domaine de la législation du travail et dans celui de la sécurité sociale. De cette manière, il y a eu un lien étroit entre les politiques du travail et les politiques sociales de Sécurité sociale, avec un soutien mutuel, dans le but de les influencer l'une et l'autre.
Ainsi, si l’on se concentre sur les mesures dans le domaine de la sécurité sociale, elles ont eu un triple objectif. Tout d'abord, s'occuper de la population touchée par la paralysie de l'activité économique et, avec elle, de la perte des revenus salariaux de plusieurs millions de travailleurs. Deuxièmement, alléger les coûts supportés par les entreprises pour le paiement des cotisations de sécurité sociale afin d'éviter les licenciements. Troisièmement, des mesures spécifiques ont été prises pour lutter contre la situation d'extrême pauvreté des populations les plus vulnérables sur le plan économique.