3 - Mon troisième point est basé sur le retour des partenaires sociaux italiens sur la scène du dialogue social avec le gouvernement. Le 14 mars 2020, un protocole trilatéral a été signé en vue de contenir la contagion sur les lieux de travail. Il est intéressant de noter qu'après des années de "désintermédiation" et de réticence généralisée à établir des consensus par la consultation des partenaires sociaux, un accord a été conclu pour garantir les intérêts publics. La pertinence de ce procédé juridique, qui permet de répondre par le dialogue social à l'objectif principal poursuivi par l’ensemble des signataires, est confirmée par le fait que la législation ultérieure s'y réfère, selon une technique bien connue en droit européen du travail comparé. Les sources volontaires et juridiques se complètent de manière subsidiaire, permettant une applicabilité généralisée dans l’intérêt de l’ensemble des parties prenantes. Le 24 avril, le protocole a intégré de nouvelles clauses, convenues de manière trilatérale, et destinées à planifier, de façon précise, un retour progressif au travail.
Un autre résultat du dialogue social d'urgence - qui n'est pas non plus inconnu du droit du travail européen - est l'opportunité qui en résulte pour des accords décentralisés, dans des entreprises prêtes à reprendre leurs activités. C'est une façon de préciser, au sein de l’entreprise, la façon d'appliquer les exigences de santé et de sécurité au travail, en les harmonisant avec les obligations des employeurs d'évaluer l’ensemble des risques et de prendre toutes les précautions nécessaires. La difficulté tient au fait que la pandémie de Covid-19 est considérée comme un "risque biologique générique", donc potentiellement sans rapport avec les processus de production et l'organisation du travail spécifiques des entreprises.
Il est nécessaire d’aller plus loin dans l’analyse. En réponse à la pandémie, les partenaires sociaux ont la charge d'assurer un intérêt public généralisé. Les accords décentralisés font référence à la responsabilité que chaque individu porte, dans le respect des lignes directrices nationales convenues dans le protocole. Une obligation - à la fois éthique et juridique - est inscrite dans une convention collective, alors que la nature prétendument "générique" du risque devrait exempter les employeurs d'obligations spécifiques. Les mesures à adopter uniformément dans tout le pays sont transposées dans un cadre national consensuel ; des accords décentralisés adaptent les lignes directrices nationales à des lieux de travail spécifiques et à des processus de production définis.
Il y a beaucoup à réfléchir, notamment en ce qui concerne la fonction contraignante de ces textes, assortie d'un système de sanctions qui reste à préciser.
En outre, la législation d'urgence italienne fait référence aux conventions collectives afin d'évaluer que les entreprises bénéficiant d'un soutien économique ne mettent pas en place des réductions d'emploi. Ce thème est également récurrent dans le droit du travail comparé et a retenu une forte attention lors de la précédente crise économique, plaidant pour la responsabilité des négociateurs sur chaque site, chaque fois qu'un équilibre doit être établi entre les libertés économiques et les droits du travail.
Le droit du travail a, au fil des années, prouvé son "autonomie" en s'appuyant sur sa propre logique interne, qui repose sur une multiplicité de sources et sur les sanctions qui y sont liées. Il est temps de renouveler et d'étendre cette logique, en laissant de côté l'égoïsme et en encourageant la solidarité, en gardant à l'esprit que la législation d'urgence est temporaire et ne doit pas attaquer les fondements constitutionnels des systèmes juridiques.